La bête qui meurt...
Philip Roth
Éditions Gallimard
2004 – 137 pages
Roman
... mais, qui résiste de toutes ses forces.
Ce n'est qu'après avoir vu le film tiré fidèlement de ce roman (Elegy avec Ben Kingsley et Penelope Cruz) que j'ai réalisé que ce bouquin dormait, étrangement, depuis un bon moment sur un rayon de ma bibliothèque.
David Kepesh est un universitaire, professeur de littérature, esthète et critique culturel dans une émission marginale diffusée sur une chaîne câblée. Un statut professionnel qui lui vaut une certaine réputation, en particulier auprès de ses étudiantes. À 60 ans passés, il vivra une autre histoire d'amour avec l'une d'elles, la sublime Consuela. Mais cette histoire sera différente, elle le consumera tout entier. Le vieux libertaire connaîtra la violence du désir de possession, la débilitation du sentiment de jalousie et la souffrance de la dépendance amoureuse. Quelques années après leur rupture, la belle revient avec une demande très particulière, marquée de toute l'ironie que l'auteur a cachée dans le titre de son roman.
Au nom du « quelque chose d’adolescent qui ne nous quitte jamais », Roth a écrit un livre sur la bête en nous qui sent la mort s'approcher, mais qui se bat avec l'énergie du désespoir pour vivre encore et encore. D'un écrivain moins talentueux, on aurait pu craindre que ce roman prenne une teinte glauque, ce n'est pas le cas ici, à peine quelques longueurs à lui reprocher. L'écriture toujours précise, et un peu sèche, de Roth est un modèle d'efficacité au service d'histoires profondément humaines. Il est, parmi les grands auteurs américains contemporains, l’un de mes préférés.
Un homme
Philip Roth
Éditions Gallimard
2006 — 153 pages
Roman
L'habit qui fait le moine.
La couverture de ce bouquin est noire, comme la mort. Noire, mais belle malgré l'impression d'un rendez-vous morbide auquel on se sait déjà convié. Roth nous y parle de la vieillesse dans un long plan-séquence à l'issue inévitable. Une histoire qui n’est pas la nôtre, mais qui le sera. Une invite à rencontrer face à face notre inéluctable et létale décrépitude physique. Brrr ! Telles on été mes premières impressions de lecture.
Mais, à la réflexion, je m'attendais à plus. Il donne de son héros ordinaire une vue trop générale, trop détachée pour qu'on s'y attache, pour que son humanité nous touche, une étrange forme de pudeur. Il en résulte un puzzle, et non un tableau. Néanmoins...
Lu à la suite de La bête qui meurt, dont il est une sorte de prolongement, où il avait parlé de la déchéance du corps à travers l’exubérance sexuelle et le désir de vivre. Ici, tout est clinique, le langage est médical dans la forme comme dans le ton et la fameuse précision du propos de Roth y est, pardonnez le cliché, chirurgicale. La vie de l’homme est racontée à travers la loupe de ses maladies, d’une hernie à 9 ans jusqu’à ses complications cardiaques finales. Comme définie par ses malaises et maladies, rythmée par elle et non par les autres événements.
Doit-on y sentir une recherce de détachement de l’auteur à l'égard d'un récit qui pourrait ressembler à sa réalité, il a 75 ans. Peut-être, mais ce détachement n'en rend que plus bouleversante la solitude et l'angoisse de la fin dont il est question. Vous me direz qu'il doit être difficile de s’emballer pour un roman qui nous rappelle à chaque page notre fragilité et notre inévitable fin. J'en conviens. C'est un livre plutôt dérangeant à lire. Mais je ne regrette pas du tout de l'avoir fait.
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